dimanche 17 janvier 2016

Jardin le flamboyant


 
La virulence d’un manifeste se mesure à l’enthousiasme qu’il suscite. Sous-titré Manifeste pour les Faizeux, le livre d’Alexandre Jardin Laissez-nous faire ! On a déjà commencé réunit plusieurs qualités indispensables pour entrainer ses lecteurs.

 

Appel à l’action

L’auteur lance un appel à la famille des « faizeux » qui prennent en charge des problèmes concrets du pays et fabriquent sur le terrain leur légitimité.  Son projet, ce n’est pas de fonder un énième parti politique prétendument neuf ou un think tank empilant des rapports volumineux mais un vaste do tank citoyen. Parmi les mots d’ordre : collaboration, partage unité et inclusion. Il s’agit de faire de la société civile aux ressources éparses, émiettées, une formidable puissance politique. 

 

Alexandre Jardin sait de quoi il parle. Ce sont ces « faizeux »  (dont il fait lui-même partie) qui étaient à l’origine des mouvements citoyens et collaboratifs « Lire et faire lire » et « Bleu Blanc Zèbre ». Ce dernier réunit aujourd’hui 200 opérateurs de la société civile tels que des associations, fondations, acteurs des services publics, mairies, mutuelles ou entreprises. Ses participants, les Zèbres, sont regroupés par BBZ dans des Bouquets de solutions thématiques. Contrairement aux « dizeux », ces « faizeux » diffuseurs de bonnes pratiques seront jugés sur les faits et non les promesses. Car « toute promesse est l’aveu d’une impuissance présente. […] Promettre, c’est désormais se décrédibiliser ».

 

 

Colère et révolte 

L’auteur n’hésite pas à jeter le discrédit sur les hommes et partis politiques qui en prennent pour leur grade. Les premiers en tant que gens irréels aux méthodes empesées et inaccessibles aux doutes, des « mini-Colbert » étatistes et dirigistes à l’ego démesuré, « des équipes technocratisées qui ont atteint les limites de l’incompétence ». Les deuxièmes, en tant que « glaciales machines calculatrices, capables de s’asseoir sans ciller sur leurs valeurs les plus fondatrices ».

 

L’écrivain fustige également l’esprit moutonnier qui empêche un renouvellement audacieux : « Ras le bol de cette société civile plaintive, obéissante et courbeuse d’échine ! » Parmi les passages les plus remarquables, un éloge de désobéissance positive, constructive et solidaire. Lorsque les chemins raisonnables et classiques sont devenus les impasses, la désobéissance est légitime et nécessaire. Tel est le sens de cette incantation, appelant à désobéir à aux élus, à la doxa, aux énarques, à tous les adeptes du déni, aux partis momifiés et à sa propre lâcheté.  A ce propos, l’auteur n’hésite pas à invoquer l’esprit Charlie ou le sursaut républicain ravivant le courage des Résistants.

 

Force romanesque 

L’Histoire a d’ailleurs toute sa place dans les visions de celui qui « a longtemps porté un masque de romancier » en essayant de corriger le réel par écrit. L’ouvrage de Jardin peut être lu aussi comme un récit intime ponctué des rencontres mémorables. L’écrivain qui depuis L’Île des gauchers ne recule pas devant le genre utopique est toujours à la recherche du Héros et d’une idée du réel pouvant se substituer à la fiction pure. D’où les références historiques et le recours aux modèles, ces « tourbillons humains », comme Churchill ou de Gaulle. Car selon Jardin, un président, c’est avant tout l’auteur du grand roman national et le metteur en mots d’une aventure collective. « Or le malheur veut que les présidents qui se sont succédé depuis François Mitterrand n’ont pas raconté à la France de grands romans vivifiants ». Telle princesse ensorcelée, la France lui apparaît comme un réservoir d’énergies dormantes ; elle n’attend qu’à être réveillée par « les amants de la République ». Une belle occasion pour célébrer la créativité désordonnée et féconde d’une société vivante et auto-organisée, l’ingéniosité et l’inventivité exubérante des  gens qui se bougent, souvent de façon bénévole. Les gens inaptes au moule, férus de liberté et naturellement bienveillants, de « grands caractères anormalement vivants qui redessinent le monde ». Porté par les réseaux sociaux, cette énergie existe grâce à l’élan des entrepreneurs, des fonctionnaires innovants, des militants associatifs qui raisonnent out of the box : « les dingos de vie, les aspirateurs à idées neuves, les amateurs de folies efficaces et les gentils » qui exigent un grand rôle. Il ne faut pas leur demander  de la cohérence : la complexité de la vie appelle des solutions très diverses et souvent contradictoires. Ce qui compte, c’est de faire jaillir des solutions opérationnelles là où les énarques  des ministères ne voient que des problèmes. C’est la vocation des bouquets des « zèbres » agissant avec peu de moyens, pour combattre l'illettrisme, éduquer des jeunes, permettre de trouver ou de retrouver un emploi, mettre des livres à portée de défavorisés, transporter des personnes à mobilité réduite, donner accès à un logement décent à ceux qui n'en ont pas.

 

La force romanesque de Jardin, c’est aussi sa puissance langagière, cette capacité à nommer les choses qui est la marque du leadership réel,  à « féconder notre langage » en lui faisant des enfants « exaltés, turbulents et vivants ». Tels sont par exemple de nombreux néologismes peuplant les pages de ce livre : conseildétateux, emparisianisés, marinesque, chruchillesque, charlien, véroniquien, abbépierresque…

 

Et pour couronner le tout, il y a le titre. Le titre en impératif qui ne laisse aucun doute sur l’objet de ce manifeste. Une injonction plutôt qu’une demande et qui n’est pas sans rappeler cette tirade véhémente de Marquis d'Argenson, l’un des premiers critiques de l’interventionnisme à la française « Laissez faire, telle devrait être la devise de toute puissance publique, depuis que le monde est civilisé. […] Laissez faire, morbleu ! Laissez faire !! »

mercredi 6 janvier 2016

Un manifeste au féminin?




Voilà qui semble excentrique.

 
Prenez une anthologie au hasard et regardez la table des matières. Aucun nom féminin ne vous sautera aux yeux. Les hommes écrivent les manifestes et les femmes les rassemblent, les annotent et les mettent en œuvre. Elles lisent et exécutent à l’ombre des beaux parleurs. Les déclarations et le leadership, ce n’est pas pour elles.

 
Un manifeste au féminin ?

 
Une chose difficile à imaginer dans un monde où les rôles sont repartis comme le dictent le bon sens et les bonnes manières.

 
Les filles belles et sexy écrivent de la chick lit.

 
Les filles drôles et bavardes écrivent des sketchs.

 
Les filles intellos écrivent des essais.

 
Des filles qui écrivent les manifestes ressemblent forcement aux Femen ou à Virginie Despentes, car les mots « femme » et « publique » ne vont pas très bien ensemble. Ce sont celles qui ne savent pas se faire discrètes. Celles qui abusent et s’exhibent, en nous mettant mal à l’aise. Elles font ce qui ne se fait pas, ce qu’on ne leur pardonnera pas. Elles se conduisent de façon virile et agressive (ou vulgaire et hystérique). Elles savent donner et encaisser les coups, elles dénoncent et revendiquent. Elles ne cherchent pas à plaire, elles ne pleurent pas, elles n’ont pas peur, elles veulent refaire le monde.

 
Chères amies, l’aventure vous tente ? Alors vous savez ce qu’il vous reste à faire…
 


 

mercredi 30 décembre 2015

"Mon hiver à Paris", l'art de résister à la française




Le Comité Régional du Tourisme (CRT) Paris Ile-de-France met en place un dispositif de communication autour du guide « Mon Hiver à Paris » destiné à relancer le tourisme français et international. La nouvelle version disponible depuis le 14 décembre, fait référence aux attentats de Paris, avec une photo de la tour Eiffel tricolore et affichant la devise de la ville : « Fluctuat nec mergitur ».

Conséquence directe des attaques, les professionnels du tourisme franciliens ont accusé, d'après le journal Direct Matin, une réduction de leur activité de 24% au mois de novembre. Les établissements du secteur (hôtels, restaurants) ont également vu leur fréquentation baisser de 27%. Les Italiens, les Japonais et les Brésiliens sont ceux qui boudent le plus la région depuis les attentats.

Dans ses 66 pages, ce guide touristique édité deux fois par an en anglais et en français, présente l’art de vivre à la française, avec une multitude d'adresses et d'informations pratiques. Pour faire découvrir aux touristes Paris et sa région, il propose une série d’activités classées par thèmes :

- Shopping, avec un tour d’horizon des créateurs symboles de la French Touch comme IRO A.P.C., Maje… et un nouveau venu Sézane. Une double page « Shopping green » fait découvrir le meilleur du shopping éthique, chic et responsable, de l’habillement à la décoration. 

- Gastronomie, des balades gourmandes aux délices sucrés dont la notoriété a fait le tour du monde : l’Opéra, le St Honoré, l’Eclair, des marchés traditionnels aux épiceries fines, la gourmandise et la convivialité sont au rendez-vous.

- Féérie, Paris ville lumière déploie sa magie le temps de l’hiver avec les animations de Noël, les cirques, les spectacles pour les grands et les petits.

Le guides propose également 7 idées pour voir « Paris et sa Région en couleurs », parcours de sorties organisés par « profils » ou par « envies », reflétant les tendances et les activités de cette période : arty / en famille / fashionista / noctambule / gourmand / amoureux. Une nouveauté cette année : un parcours « green » (shopping, culture, applis) en écho à la COP 21.

De nombreuses villes franciliennes sont citées, comme Enghien-les-Bains (95), qui accueille actuellement un village d’hiver avec patinoire et piste de luge, Fontainebleau (77) pour son château ou encore Le Bourget (93) pour son musée de l’Air et de l’Espace.

Tiré à plus de 200 000 exemplaires, le guide papier est diffusé en France sur les 12 Points Information Tourisme du CRT (Aéroports Paris CDG et Paris Orly, Versailles, Disneyland Paris et Galeries Lafayette), dans les Offices de Tourisme et via le réseau hôtelier.

mardi 22 décembre 2015

Bientôt "Mein Kampf" en cadeau de Noël ?


 
 
Une vision extrêmement dérangeante: le syndicat allemand des enseignants veut inclure Mein Kampf d’Adolf Hitler dans le programme scolaire.

 

Pendant 70 ans, ce  « texte fondateur » détaillant les bases idéologiques de l’idéologie nazie a été interdit à la vente en Allemagne. Fin 2015  il doit tomber dans le domaine public, ce qui ouvrirait la voie à une réédition. Celle-ci comprendrait le texte original sur les pages de droite et des commentaires sur la page de gauche. Cette version annotée sera la seule autorisée sur le territoire allemand, alors que les ouvrages non commentés resteront interdits à la vente.

 

"Une lecture de certains passages dans la salle de classe, bien encadrée par les enseignants, peut être une contribution importante à l’immunisation des adolescents contre l'extrémisme politique" affirme Josef Kraus, le président le syndicat allemand des enseignants interrogé par le journal Handelsblatt. "Car ce qui est interdit dans les écoles - nous le savons grâce aux indices du Département fédéral des médias dangereux pour la jeunesse – est particulièrement demandé, par exemple via l'Internet, ajoute Kraus. Il vaut que la réception de Mein Kampf soit encadré par les historiens et les professeurs de politique."

 

Pour ces raisons, l’ouvrage serait enseigné uniquement dans les lycées à partir de l’âge de 16 ans, à travers des extraits choisis. De façon générale, son étude pourrait aider à comprendre et à prévenir la genèse des idéologies inhumaines véhiculant le discours de haine qui renaissent aujourd’hui dans un autre contexte et avec d’autres justifications.

 

Après sa tentative de coup d'Etat en Novembre 1923, Adolf Hitler a écrit Mein Kampf  lors de sa détention à la prison de  Landsberg. Dans ce document, il a présenté ses opinions et ses projets politiques, et notamment sa «théorie raciale».


Le premier tome a paru en 1925, le deuxième l’année suivante. Au début, le livre n’a pas été pris au sérieux par les partis démocratiques. Mais à l'automne 1944, son tirage a atteint 12,4 millions d'exemplaires en Allemagne. Après la guerre le gouvernement militaire a transféré les droits d'auteur à l'État libre de Bavière, ce qui empêchait  toute réédition ultérieure dire pendant les 70 ans suivant la mort du dictateur.


dimanche 13 décembre 2015

"Marre du rose": la nouvelle campagne contre les jouets sexistes


 
Cette année encore, sous le sapin, des millions d’enfants recevront des cadeaux au code couleur traditionnel : du bleu, du gris, ou du noir pour les garçons, du rose ou du violet pour les filles. Aux premiers, l'exploration, la découverte, l’invention, le combat, le danger, l’aventure, bref la transcendance si chère à Simone de Beauvoir. Aux deuxièmes, à travers un design « girly », l’immanence feutrée et répétitive des fées du logis : l'intérieur, le soin, la sécurité, le calme, le sentiment... Et comme le jeu présente un aspect important du développement psychologique et cognitif des enfants, c'est toute une construction sociale qui s'organise petit à petit autour de la hotte du Père Noël.

 

Ces rôles stéréotypés sont rarement à l’avantage des filles, invitées à s’occuper de la maison, à pouponner, à rêver au prince charmant et à se préparer à lui plaire en soignant leur apparence. Ils présentent également le danger d’hypersexualisation des fillettes, dénoncée par des campagnes contre la publicité sexiste et documentée dans un rapport du gouvernement de mars 2012.

 

Outre une séparation caricaturale des filles et des garçons, les catalogues de Noël témoignent de la diversité bien plus importante des activités proposées aux garçons et du choix de cantonner les filles à la sphère privée et aux apparences physiques. Les garçons disposent d’une gamme d’activités socialement valorisées à travers la science et la technique. La dévalorisation du féminin va très loin quand un objet est proposé avec des fonctions différentes pour les filles et les garçons : ordinateur blanc-gris au design sérieux pour les garçons qui propose 50 fonctions et sa version pour les filles rose au design ludique, proposant... 25 fonctions

 

Les jouets les plus franchement sexistes sont ceux dits d’imitation (des parents). Dans la partie « comme maman » : fer à repasser, robot ménager, kit de la caissière ; dans celle « comme papa » : table complète de bricolage, jeux de constructions… Ces jouets et la façon de les présenter limitent l’accomplissement des filles et les enferment dans des rôles stéréotypés, souvent dépassés dans la réalité par les évolutions de la société et un partage plus équitable des tâches.

 

Proposés dès le plus jeune âge, les jouets sexistes peuvent induire un conditionnement, qui n’est peut-être pas sans répercussion sur le choix ultérieur de l’orientation scolaire et des métiers. Placer l’enfant dans un contexte de la ségrégation sexiste bride son imaginaire, sa créativité et ses projections dans l’avenir. Dénoncée dans les années 1970, elle perdure, malgré les engagements internationaux, européens ou nationaux de lutte contre les stéréotypes de genre qui assignent filles et garçons à des rôles culturellement construits par la société. Le phénomène a même tendance eu à s’amplifier depuis les années 1990, avec la multiplication des cibles commerciales sous les contraintes du marché, notamment au travers les nouvelles gammes de jeux de construction spécial filles. Emissions télé, publicité, commerce, magazines pour les parents et nombre d’ouvrages pseudo psychologiques, tout conforte des clivages de genre, opposant de pseudo valeurs « féminines », par exemple la passivité, à des valeurs qui seraient intrinsèquement « masculines » comme l’agressivité et la conquête du monde. Or ce clivage soit disant naturel est démenti par des études récentes qui témoignent de la plasticité du cerveau humain.

 

Heureusement, de nombreux parents, associations, consommateur et consommatrices, excédés par le "marketing genré" commencent à prendre des initiatives. En France, le blog macholand.fr, qui propose aux internautes de signaler des faits sexistes, a épingle les hypermarchés Cora pour leur catalogue 2014 avec un message à leur envoyer : "J’ai rencontré hier une petite fille qui voulait jouer avec des robots et un petit garçon qui voulait jouer à la poupée. Si l’on en croit votre catalogue, ce n’est pas possible. Ma question est la suivante : ces enfants seraient-ils de dangereux déviants ou (autre hypothèse), votre catalogue ne serait-il plus tout à fait adapté au 21ème siècle et nécessiterait une petite mise à jour ? Merci de faire le nécessaire pour ouvrir le champ des possibles aux enfants et ne pas leur fermer des portes avant leur 10ème anniversaire !"

 

Cette année, les des associations féministes lancent une nouvelle campagne de sensibilisation aux stéréotypes sexistes véhiculés par les jouets, baptisée "Marre du rose". Des militantes d’"Osez le Féminisme" et des" Chiennes de garde" distribuent actuellement des tracts devant des magasins de jouets à Paris et dans plusieurs villes de France. Elles demandent notamment l'abandon par les magasins des rayons séparés filles/garçons et également du code couleur rose/bleu. Elles invitent aussi le grand public à interpeller l'industrie du jouet, en envoyant sur les comptes Facebook de grandes enseignes de distribution et de fabricants un message disponible sur leur site.

 


Parmi les jouets incriminés: la collection Lego Friends destinée aux fillettes, et le Monopoly décliné en rose, où les "banques et hôtels sont remplacés par des ongleries et des magasins de lingerie". "Nous nageons en pleine régression", accusent les militantes féministes. "Nombre de jouets en 1980 étaient unisexes" et "se passaient de frères à sœurs", rappellent les deux associations. "Pour doubler votre chiffre d'affaires, vous déclinez des jeux en rose et en bleu, enfermant filles et garçons dans des rôles totalement périmés". Cette régression à la fois sociologique et consumériste s’est exacerbée dans le contexte de la polémique sur "le genre" : certains vont jusqu’à déplorer l’effort fait par l’enseigne Super U de proposer en 2013 un catalogue de jouets moins sexiste, montrant des photos de garçons avec des dînettes et de filles avec des voitures...

 


Avec humour, les militantes d'"Osez le féminisme" ont aussi détourné la célèbre chanson "Libérée, délivrée", du film de Disney, "La Reine des neiges", en "Libérée... des clichés" : une autre façon de faire avancer le débat qui est loin d’être clos.

 

samedi 7 novembre 2015

Manifesto Attitude : Edilivre en marge du prix Goncourt




Chacun a ses raisons d’écrire un manifeste. Pour la maison d’édition alternative Edilivre, il s’agit de revendiquer la démocratisation de l’édition. Tel est l’objet de leur Manifesto diffusé le  3 novembre lors d’une manifestation devant Drouant, le célèbre restaurant où délibère tous les ans l'Académie Goncourt. Sous les slogans aussi décalés qu’emblématiques  comme « Ouvrez les maisons closes », « J'ai le feu aux pages », « Écrire...et plus si affinités », Edilivre a profité de la couverture médiatique autour de la remise du prix Goncourt pour interpeller les journalistes de façon joyeuse et humoristique.

 

Sans remettre en question ou boycotter le prix en tant que tel, les auteurs militants ont présenté leur vision de la publication ouverte au plus grand nombre. Démocratiser l’accès à l’édition permettrait à leurs yeux de révéler plus de talents tout en échappant à la loi du formatage. Ce n’est pas par hasard que certains best-sellers, comme «Les Gens heureux lisent et boivent du café » d’Agnès Martin-Lugand, ont pu émerger et être plébiscités par le public hors des canaux de l’édition traditionnelle.

Pour simplifier le processus éditorial, il faudrait  faire évoluer les codes. Fidèles à Edilivre, ses auteurs défendent un modèle d’édition qui se situe à la frontière de l’autoédition et de l’édition traditionnelle : à la fois innovant grâce au numérique mais toujours accompagné par des équipes engagées et professionnelles. L’un des objectifs d’Edilivre et de défendre l’édition collaborative et communautaire. C’est dans cette optique que la maison a crée 27 Clubs Auteurs permettant aux auteurs d’une même région de s’entraider et de multiplier les opportunités pour promouvoir leur livre.


 
Voici, dans son intégralité, le manifeste de ces auteurs engagés.
 
"Démocratiser l’édition : c’est nécessaire et c’est maintenant ! Nous sommes des militants de la démocratisation de l’édition.
 
Pour révéler plus de talents et en démocratiser l’accès, il est urgent de défendre une nouvelle vision de l’édition.
 
OUVERT : Démocratiser l’édition, c’est avoir l’ouverture nécessaire pour permettre à chaque auteur de s’exprimer !
 
 Peu importe le sexe, la religion, la couleur de peau, l’origine sociale ou la musique que l’on écoute, nous sommes convaincus que chacun a son mot à dire, une histoire à raconter, une expérience à partager. Pour révéler plus de talents, il faut démocratiser l’accès à l’édition.
 
SIMPLIFIÉ : Démocratiser l’édition, c’est simplifier le processus pour faire vivre aux auteurs une expérience de publication intuitive, conviviale et libre !
 
 Un projet d’écriture doit pouvoir se réaliser le plus simplement possible et sans contraintes lourdes. Les moyens humains et techniques — avec le numérique — permettent aujourd’hui d’offrir aux auteurs une expérience de publication intuitive, conviviale et libre, depuis un clavier d’ordinateur ou une simple tablette, en parfaite autonomie et sans dénaturer le manuscrit soumis.
 
ACCESSIBLE : Démocratiser l’édition, c’est élargir l’accès, tout en maintenant un accompagnement éditorial de l’auteur par des professionnels impliqués !
 
 Les relations humaines nourrissent le processus de publication de l’ouvrage. La qualité des échanges avec des équipes engagées et professionnelles favorise l’accompagnement de l’auteur tout au long du processus et lui permet ainsi d’éditer son manuscrit dans les règles de l’art, aussi bien au format papier qu’au format numérique.
 
GÉNÉREUX : Démocratiser l’édition, c’est rémunérer généreusement chaque auteur !
 
 En tant qu’élément central de l’activité de l’éditeur, l’auteur doit faire l’objet d’une attention particulière, impliquant une rémunération généreuse en fonction de ses ventes, aussi bien au format papier qu’au format numérique.
 
AMBITIEUX : Démocratiser l’édition, c’est permettre aux auteurs d’être accessibles au plus grand nombre !
 
Publier est la mission première de l’éditeur mais son rôle est aussi de redoubler d’efforts pour le référencement et la promotion de son catalogue."
 

lundi 2 novembre 2015

Raif Badawi, Prix Sakharov 2015




Le 29 octobre, le Parlement Européen de Strasbourg a décerné son prix Sakharov 2015 pour la liberté d’expression au blogueur saoudien Raif Badawi. Emprisonné depuis 2012 dans son pays pour « insulte » à l'islam, il a été condamné à 10 ans de prison et 1 000 coups de fouet, à raison de 50 par semaine. Le jeune homme de 31 ans n'a pour l'instant été flagellé qu'une seule fois, en public, en janvier dernier.

 

Après avoir annoncé le nom du lauréat 2015, le président du Parlement européen, Martin Schulz, a appelé le roi d'Arabie saoudite, Salman, à le libérer « immédiatement »  pour qu’il retrouve sa famille et lui donner la possibilité de recevoir ce prix à Strasbourg pendant la session de décembre. Selon Martin Schulz,  Raif Badawi, est devenu certainement, pour beaucoup de gens, un symbole dans notre monde numérique dans lequel il se bat. L'annonce a été accueillie par une ovation de l'Assemblée.

 

Né en 1984, l’animateur du site internet Liberal Saudi Network est aussi lauréat 2014 du prix Reporters sans frontières-TV5 pour la liberté de la presse. Il avait été arrêté le 17 juin 2012 pour des articles publiés sur son site Liberal Saudi Network, un « réseau de discussions en ligne dont l’objectif est d’encourager les débats politiques, religieux et sociaux ». Ses écrits, notamment un sur la police religieuse, la « muttawa », ont irrité le régime. Plusieurs manifestations pour exiger sa libération se sont tenues au Québec, ainsi qu'en Europe. Amnesty International s'est aussi impliquée dans ce dossier.

 

Le prix Sakharov pour la liberté de l'esprit, est une récompense prestigieuse. Portant le nom du scientifique et dissident soviétique Andrei Sakharov, il fut créé en 1988 par le Parlement européen pour honorer les personnes ou les organisations qui ont consacré leur existence à la défense des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

 

Les candidats au prix Sakharov sont nommés par les membres du Parlement européen. Ensuite, les nominations sont évaluées lors d'une réunion de la commission des affaires étrangères et de la commission du développement. Au mois d'octobre, après le vote final de la Conférence des présidents, le lauréat est annoncé. Le prix Sakharov, doté de 50 000 euros, est remis par le président du Parlement européen en session plénière à Strasbourg. Parmi les lauréats précédents figurent l'ex-président sud-africain Nelson Mandela, la dissidente birmane Aung San Suu Kyi et la jeune Pakistanaise Malala Yousafzai.

 
 

Le nouveau lauréat succède au médecin congolais Denis Mukwege. Raif Badawi a été choisi par les chefs de file des groupes politiques représentés au Parlement de Strasbourg, parmi deux autres nominés : une coalition d'opposants vénézuéliens et – à titre posthume - l'opposant russe Boris Nemtsov, assassiné à Moscou cette année.

 

Ensaf Haidar, l'épouse du jeune blogueur, a fui au Canada avec leurs trois enfants après avoir reçu des menaces de mort. Elle mène une campagne active pour obtenir la libération de son mari. Ses demandes au roi, comme celles de l'Union européenne, de l'ONU et des Etats-Unis, sont pour l'instant restées lettre morte. La condamnation de Raif Badawi a été confirmée par la Cour suprême saoudienne en juin 2015. Et selon son épouse, le blogueur pourrait subir une nouvelle séance de sévices corporels tout prochainement.

 

Si l’attribution du prix Sakharov fait l’unanimité partout dans le monde, elle pourrait provoquer la colère des autorités saoudiennes. En juin dernier, Riyad a fait savoir qu’il n’accepterait aucune « ingérence étrangère » dans « ses affaires internes ».

Pour soutenir Raif:

https://www.facebook.com/free.badawi