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Maroussia Klimova à l'INALCO |
Contrairement à Mourka, l’héroïne
féline d’un chef-d’œuvre du folklore criminel russe à qui elle doit son
pseudonyme, Maroussia Klimova ne porte pas un revolver et un blouson en cuir.
Mais elle semble avoir une préférence pour un style légèrement gothique ou
plutôt décadent, selon ses propres termes, peut-être un tribut à sa réputation
de « femme terrible », provocatrice et sulfureuse.
Lors de sa soirée à l'INALCO organisée
par le club littéraire « Je lis ! » le 6 janvier 2017, cette auteure russe contemporaine
se proclamant « marginale » et « nietzschéenne » a lu des
extraits de ses livres dont Mon histoire
de la littérature russe, mais aussi Maison
à Bois-Colombes, un roman autobiographique où elle décrit sa rencontre avec
la veuve de Louis-Ferdinand Céline. Connue en France surtout comme sa
traductrice et spécialiste de son œuvre, décorée par l’Ordre des Arts et des Lettres,
Tatiana Kondratovitch de son vrai nom fait partie de la
contre-culture russe actuelle. Dans son pays, on lui reproche souvent ses
jugements paradoxaux, sa misanthropie, son mépris de la morale bourgeoise et
son culte de la beauté.
En l’entendant parler de régime soviétique,
on comprend un peu mieux les origines de la révolte de cette traductrice formée
à l’Université de Leningrad qui avait commencé sa carrière professionnelle par
la destruction de son diplôme, avant d’être licenciée du Musée de la religion pour
le rejet de la propagande athéiste. Etudiante, elle choisit de traduire Céline
parce que son œuvre est interdite en l’URSS et conservée dans les dépôts
spéciaux des bibliothèques (« spetskhran »). Les provocations de l’auteure
de Sang bleu et de Récits du marin liée dans sa jeunesse à
la culture Underground sont sans aucun doute enracinées dans la dissidence.
L’ouverture des frontières lui
avait fait penser à une bouteille de champagne qu’on débouche. Fidèle à
elle-même, elle fait partie aujourd’hui des rares personnes à faire l’éloge des
années 1990. Plus de 20 ans après le début de la Perestroïka, l’organisatrice
des festivals de la Décadence a encore des comptes à régler avec le communisme
qui « déteste la beauté » et essaie de formater les écrivains. C’est
ce rejet qui la pousse à miser sur les nuits noires de Saint-Pétersbourg par
opposition à ses nuits blanches et
sur d’Anthès contre Pouchkine. Une stratégie qui finalement s’est révélée
payante non seulement pour sa survie et sa liberté, mais aussi pour sa
notoriété nationale : depuis 2007, Maroussia Klimova fait partie des
personnalités les plus connues de Saint-Pétersbourg…
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