dimanche 17 mai 2015

Prouesse linguistique récompensée





Les « élites » françaises ne sont pas les seules à dénoncer les attaques contre le plurilinguisme et la diversité culturelle visant une mise au pas éducative. Elles ont des alliés à l’autre bout de la planète qui, pour se faire entendre, se montrent beaucoup moins frileux et traditionalistes dans leurs démarches. Ainsi, Patrick Stewart, un doctorant amérindien vivant au Canada, a remis au jury une thèse de 52 438 mots sans aucun signe de ponctuation : pas de virgule, pas de point, pas de majuscule et pas de paragraphe visible. Le National Post rapporte que sur 149 pages, il y a tout de même un ou deux points d'interrogation.

 «J’aime dire qu’il s’agit d’une seule phrase, longue, sans coupure, du début à la fin » commente l’étudiant. Par ce geste, il souhaite dénoncer l’oppression post-coloniale de la culture amérindienne, mais aussi « l’acceptation aveugle des conventions de la langue anglaise dans le monde universitaire ». Patrick Stewart explique sa démarche dans l'introduction de sa thèse: «Pour me défendre je dois dire que mon style d'écriture ne vient pas d'une certaine paresse ou d'un manque de connaissance de la langue anglaise ; c'est une forme de résistance grammaticale déconstructionniste».

Il compare ensuite sa liberté de ton avec celle du poète américain E.E. Cummings, connu pour son approche expérimentale de la ponctuation. Au départ, Patrick Stewart, qui a 61 ans, avait écrit la première version de sa thèse d'architecture intitulée «L'architecture indigène à travers le savoir indigène» en langue Nisga'a, mais un professeur de l'Université de Colombie Britannique a mis son veto.

Le thésard est alors revenu avec une traduction «poétique» et quelques concessions aux universitaires: pour faciliter la vie de ses examinateurs, il a tout de même débuté chaque chapitre par un petit résumé rédigé selon les règles académiques habituelles.

Son directeur de thèse, affilié au programme des «Indigenous studies» de l'université, a reconnu que superviser ce projet avait été une «expérience très intéressante». Mais il admet que pour d'autres professeurs, ce travail a été vu comme «provocateur, presque choquant et il a fallu beaucoup d'efforts pour défendre cette approche».


Les efforts qui ont payé et qui pourraient faire des émules (un autre mot que le gouvernement socialiste voudrait bannir du dictionnaire). Car la pensée non conventionnelle est et restera l’arme favorite des « élites » dans la lutte contre le nivellement.

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