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Markus Lüpertz |
Il ne reste plus que quelques
jours pour visiter la première grande exposition de Markus Lüpertz à Paris.
C’est ici, au Musée d’Art moderne, que le mot « rétrospective » prend
tout son sens : réunissant près de 140 pièces de formats et de techniques
très variés, l’exposition retrace l’ensemble de l’œuvre de l’artiste né en 1941
en Bohème dans un parcours chronologique à rebours, de sa production la plus
récente à ses débuts. Du monde pseudo bucolique des « Arcadies »
(2013-2015), le spectateur passe au contrapposto des « Nus de dos »
(2004-2005) pour découvrir ensuite l’univers héroïque des « Hommes sans femmes.
Parsifal » (1993-1997) et le fatal et surhumain « Sourire mycénien »
(1985) du guerrier blessé. A travers les cruautés de « La guerre »
(1992) et les procédés monumentaux des « Peintures dithyrambiques »,
l’exposition remonte finalement à la série « Donald Duck » (1963),
résolument anti pop art.
Markus Lüpertz, Donald Duck (1963) |
Ce parcours permet de découvrir
une constante de l’œuvre de Lüpertz qui est la prise de risque, le refus de
toute facilité et de toute complaisance. Elle transparaît non seulement dans
l’évolution permanente de son style, la valorisation de l’esthétique de la
rupture et de la déformation (voire fragmentation), l’importance donné aux références
mythologiques et philosophiques et aux citations iconographiques (Poussin,
Matisse, Picasso, Goya, David, Manet…), mais aussi dans la multiplication des
domaines d’intervention (peinture, sculpture, théâtre, musique, poésie). Décidément,
Lüpertz « n’est pas un brand facilement reconnaissable » et n’hésite
pas, dans une série de démarches volontairement élitistes, à prendre ses
distances avec le marché de l’art.
Il s’agit,
selon lui, de la représentation d’une Muse, celle de musique qui est féminine à
ses yeux. D’où cette allure dansante et l’impression de la légèreté qui émane
de la statue, malgré son poids proche de 400 kilo. Quant à l’absence de bras,
elle serait un tribut à l’esthétique du fragment qui joue également un rôle
dans l’œuvre de Mozart. Selon Peter Iden, un critique théâtral allemand
défendant l’autonomie de l’œuvre d’art, la sculpture de Lüpertz est là pour
nous rappeler l’impossibilité de représenter sous forme humaine celui qui
n’existe aujourd’hui qu’à travers sa musique. Au final, cette statue semble
traduire un dialogue entre la peinture et la sculpture, la figuration et
l’abstraction, le passé et le présent. Mais aussi un dialogue entre le tragique
et le comique propre au créateur de « Don Giovanni ».
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Markus Lüpertz, Mozart - Eine Hommage (Salzburg) |
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